
L'interview d'Alexis Chenevier
Dimanche 13 mai 2018, le Haut-Savoyard décrochait une impressionnante et historique 6ème victoire sur la mythique Transvésubienne. Quelques jours plus tard et malgré les courbatures, il livre une interview inédite et passionnante à 1001sentiers, où il est bien évidemment question de la Transv.
CV NÉ EN 1988 PALMARES 6X VAINQUEUR DE LA TRANSVÉSUBIENNE (2013-2018), 2X VAINQUEUR ALL-MOUNTAIN CHALLENGE (2017-2018), VAINQUEUR EPIC ENDURO (2017), MULTIPLE VAINQUEUR ROC DES ALPES, ETC.
Salut Alexis, comment ça va ?
Salut Greg ! Très bien malgré mes courbatures persistantes de la TransV...
Tes débuts à VTT ?
Je ne suis pas issu d’une famille de passionnés de vélo ni forcement de sport intensif. J’ai découvert le vélo car c’était mon mode de déplacement pour aller à l’école. C’était soit le vélo, soit à pied... Mon choix était vite fait. J’avais environ 3 km aller et retour à faire tous les jours, je me souviens que je les faisais toujours à bloc, avec pour objectif de ne pas me faire doubler. Par la suite, je suis rentré dans mon premier club de vélo à l'âge de 15 ans, a priori je me débrouillais pas trop mal et mon encadrant a décidé de m'emmener faire une course VTT. C'était le championnat départemental, ma toute première course donc... et je gagne ! Forcement, ensuite je n'ai plus voulu m'arrêter et ça m'a motivé à fond pour continuer !
Ton spot favori ?
Hum, choix difficile... J'habite à coté d'Annecy, les spots superbes à rouler avec vues magnifiques, ce n'est pas ce qu'il manque là-haut, mais je crois que mon lieu favori pour rider reste le Diois dans la Drôme (26). Les sentiers sont justes fantastiques, ludiques et fun à rouler ; il y a de tout : du rapide, du technique ; et il n'y a personne, tu peux rouler des heures et des heures sans jamais croiser un randonneur. Le bonheur !
Quand il n'est pas chez lui en Haute-Savoie ou en course aux quatre coins de la France, il adore aller rider dans le Diois (Photo © Alexis Chenevier)
Ton dernier ride marquant ?
La Transvésubienne, forcément ! C'était mon objectif principal de l'année. Durant le mois précédent j'ai pensé TransV, j'ai vécu TransV, je me suis entrainé TransV. Même si je commence à avoir de l'expérience sur cette épreuve et à bien la connaitre, c’est toujours une source de stress. Pour moi, la TransV commence déjà la nuit précèdent le départ : entre stress et excitation, il m’est vraiment compliqué voir impossible de trouver le sommeil, ce qui rend la nuit très longue... Une fois le départ donné, tous ce stress s’en va (ou presque) et c’est parti pour 6h de bataille. Cette année, j’ai géré, je ne me suis jamais mis dans le rouge, j’ai pris les commande de la course dans la première descente pour ne plus la quitter. Ça parait facile comme ça, mais en fait pas du tout : c'est une lutte permanente entre mon corps et mes jambes qui me font souffrir, mes adversaires qui me font sans cesse regarder en arrière au cas ou je ne serais pas de nouveau dans leur sillage, le parcours et ses obstacles piègeux et pierreux qui me malmènent et qui ne laissent pas le droit à l'erreur, la crainte d'une grosse fringale ou encore un soucis mécanique... Cette année, je craignais vraiment le passage du Paillon et son tunnel interminable ; j'avais vu juste, cette partie dure, inroulable et éprouvante finit par te vider mentalement et rend l'arrivée sur la mer d'autant plus belle et émouvante.
“Même si je commence à avoir de l'expérience et à bien la connaitre, la Transv est toujours une source de stress.” (Photo © 1001sentiers)
Qu'est-ce qui t'a mis la puce à l'oreille en 2013 et t'a donné envie de te lancer dans l'aventure ?
Je crois que c'est Francois Bailly-Maitre qui m'en a parlé le premier et qui m'à donné envie de la faire. A l'époque, on était ensemble dans le Team XC Scott Les Saisies. Notre programme était orienté Coupe de France et Coupe du Monde de XC, mais lui commençait à s'orienter vers d'autres horizons et participait chaque année à cette fameuse TransV. Je me souviens encore de FBM me raconter ces super descentes technique, ces portages interminable et cette arrivée sur la mer. Il n'en fallait pas plus pour me motiver à venir...
Qu'est-ce que cette course a de particulier pour toi ?
Cette course représente vraiment tout ce que je cherche dans le VTT : du technique et du physique, il faut être un VTTiste complet pour aller au bout de cette épreuve. Cette course est impitoyable, extrême, elle te pousse dans tes derniers retranchements, te force à puiser dans tes réserves et te sortir de ta zone de confort. Il faut réussir à être plus fort qu'elle, à déjouer ses innombrables pièges. Il faut rester humble sur tout le parcours, ne pas s’enflammer ni en descente ni en montée, sinon tu le paies cash. Je recherche d'autres courses de cette envergure, de ce niveau technique, mais il n'y en a pas ou peu... Aujourd'hui, celles qui s'en rapprochent le plus, sans l'égaler, sont peut-être la Radon Epic Enduro et l'Ultra Raid de la Meije. Mais la TransV est unique.
Alexis Chenevier en route vers sa 6ème victoire sur la Transvésubienne / Récit complet ici (Photo © 1001sentiers)
6 victoires : un record hallucinant ! Qu’est-ce qui te motive encore ?
La transV est une de mes épreuves favorites. Je crains la période de ma vie ou je vais régresser physiquement et où je ne serais plus apte à jouer pour la gagne. Aujourd'hui, je prends un max de plaisir à rouler, à m'entrainer et je vois que je progresse toujours, c'est motivant. Alors je prends tout ce que je peux prendre, je roule autant que je peux pour ne rien regretter.... C’est sûr : j’aime les défis, j’aime me donner des objectifs et tout faire pour les réaliser. Le record pour moi ne veut pas dire grand-chose, je suis content c'est clair et même après 6 victoires l’émotion est toujours aussi grande à l'arrivée, entre joie, soulagement, fatigue et frissons !
Quel est ton souvenir le plus fort de ces 6 éditions ?
L'année 2013 forcément : ma première édition. J'étais venu pour voir, apprendre et revenir l'année d'après pour gagner. J'avais dans un coin de ma tête éventuellement un podium, mais pas plus. Cette année-là, alors troisième dans l'ascension finale, je me revois encore doubler Christophe Sauser et Pierre Geoffroy Plantet, tous les deux arrêtés sur crevaison au même endroit à l'entame de l'ultime descente. Et Pierre Geo qui me souffle au passage "Elle est pour toi celle la !" Je n'y croyais pas...
2013, 1ère victoire d'Alexis sur la Transvésubienne. Le début d'une sacrée série ! (Photo © Cyril Charpin)
Bien avant toi et ton record, la Transv c’est aussi 30 ans d’épopée. Qu'est-ce que ça t'inspire ?
30 ans... c'est également mon âge, tout un symbole ! J’ai vraiment du mal à m’imaginer ce que ça devait être une TransV avec un 26 pouces, tout rigide, 3 bars dans chaque pneus, freins cantilever… Ces vététistes là, c’étaient vraiment des guerriers ! Respect éternel !
Transvésubienne 1988... “Ces vététistes là, c’étaient vraiment des guerriers !” dixit Alexis Chenevier (Photo © UCC)
Et maintenant, quels sont tes prochains objectifs ?
Je viens de terminer ma première et plus importante partie de saison, maintenant je vais me reposer un peu et prendre du plaisir sur mon vélo. Ce qui viendra ensuite sera que du bonus !
Merci Alexis, bravo et à bientôt sur nos sentiers !
Rendez-vous le 4 juin pour 10 questions à une autre figure du VTT azuréen...